Châlons, luzerne « Servir nos clients dans ce contexte très incertain »

Désialis, leader des déshydratés destinés à l’alimentation animale était présent à la Foire de Châlons. Son directeur général Pierre Bégoc a répondu à nos questions.

Publié le 9 Septembre 2022 par Richard CREMONINI dans la Marne Agricole .

Pierre Bégoc : “Nous avons perdu plusieurs dizaines de milliers de tonnes de ressource à cause de la sécheresse estivale 2022 “.

Comment se déroule l’activité commerciale cette année ?

Pierre Bégoc. Nous avons fait le choix d’accompagner nos clients en démarrant tôt nos campagnes de commercialisation tant en ce qui concerne les pellets que les balles de luzerne. Nos produits ont répondu à des besoins de couverture centrés sur le continent européen. Face à une ressource de plus en plus difficile à estimer, la prudence dont nous avons fait preuve nous a permis de limiter notre exposition au risque. De la même manière que sur le complexe des matières premières agricoles depuis le début du conflit entre la Russie et l’Ukraine, nos produits voient leur prix progresser significativement et ce biais haussier restera d’actualité dans les prochains mois.
En effet, la sécheresse européenne pénalise l’offre en luzerne notamment en Espagne et en Italie et cela crée un appétit supplémentaire pour la luzerne française. En outre les coûts industriels ont explosé depuis le début de la guerre en Ukraine, nécessitant une grande proximité avec nos apporteurs/actionnaires afin de sécuriser nos engagements en associant systématiquement les volumes de luzerne disponibles pour le marché à une couverture énergétique ad hoc. La résilience de la filière luzerne se traduit concrètement par cette capacité à servir nos clients dans ce contexte chahuté et très incertain. Le marché doit permettre de rémunérer correctement les planteurs de luzerne afin de protéger les surfaces pour l’avenir… et la concurrence avec les céréales à paille est rude cette année.
La fermeté restera de mise sur nos marchés dans les prochains mois et nous prendrons le temps d’avoir une vision claire de l’atterrissage de nos productions d’ici au début du mois d’octobre pour tracer la suite et notamment notre feuille de route hivernale pour les pellets et pour les balles.

“Le bilan de la campagne de production est frustrant pour ne pas dire décevant”

Quel premier bilan tirez-vous de la campagne luzerne ?

P.B. Le bilan de la campagne de production est frustrant pour ne pas dire décevant. En effet, alors que les 2 premières coupes ont enregistré des résultats légèrement inférieurs avec la moyenne 5 ans (hors sécheresse 2020), la sécheresse estivale, marquée par une quasi-absence de pluie en juillet et en août, a totalement changé la donne.
Ainsi, un décrochage marqué s’est opéré au cœur de l’été suite aux vagues de chaud successives qui ont plombé la pousse des végétaux et particulièrement affecté les luzernes de première année. La troisième coupe en cours est très décevante et la 4e pourrait voir ressurgir le spectre de 2020 avec une forte baisse des surfaces effectivement récoltées.
Au final, la récolte sera très moyenne et bien en deçà de nos attentes.

Quel a été l’impact de la sécheresse sur la production ?

P.B. Nous avons perdu plusieurs dizaines de milliers de tonnes de ressource à cause de la sécheresse estivale 2022 et basculons d’un scénario médian à un scénario pessimiste en ce qui concerne nos hypothèses de travail.

Quels sont les projets de Désialis ?

P.B. Afin d’accompagner au mieux nos clients dans un monde qui bouge, nous mettons l’accent sur la poursuite de la segmentation visant à étoffer toutes nos gammes et plus particulièrement le bio (pellets et balles) tout comme celle inhérente au bien-être animal, domaine dans lequel nous comptons être un acteur visible et crédible. La recherche de valeur doit se faire sur l’ensemble des marchés. Je rajouterai que nous n’avons pas terminé nos développements dans le monde équin où nous souhaitons aussi déployer notre savoir-faire pour gagner encore en visibilité.
Ces orientations sont rendues possibles par tout le travail de décarbonation entamé par nos actionnaires il y a plusieurs années et qui nous permet aujourd’hui de poursuivre notre travail sans crainte majeure concernant la disponibilité des énergies nécessaires au bon fonctionnement des usines. Le virage précoce pris par la filière, bien accompagnée par l’expertise de Luzerne de France, vers la biomasse est une réussite sur laquelle il faudra capitaliser. Cela ne nous affranchit certes pas des hausses à venir mais cela limite drastiquement notre exposition aux énergies fossiles. C’est la solidité du socle de nos apporteurs au sein de l’UES Désialis-France Luzerne qui nous permettra d’écrire le prochain chapitre pour la luzerne. Nous y travaillons tous ensemble.

Paru le 16 septembre 2022 dans la Marne Agricole (version papier).